Ce débriefing de la Haute Route des Alpes 2019 est tout autant mon ressenti qu'un partage d'expérience pour tous ceux qui rechercheraient des informations en vue d'une inscription future.
Il s'agissait de ma première participation à une course de vélo par étapes et je n'ai donc pas de points de comparaison. Globalement, j'ai trouvé que c'était une épreuve qui valait le coup d'être courue au moins une fois. Est-ce que je reviendrai sur la Haute Route des Alpes ? A voir. Est-ce que je participerais à d'autres événements de la Haute Route ? A voir également. Contrairement à beaucoup de participants qui reviennent d'année en année, je n'ai pas été "contaminé" par la Haute Route.
Pour aller directement à l'essentiel, voici ce que j'ai le plus et le moins aimé :
Les plus :
Les plus :
- Le principe même de l'épreuve, sorte de "mini" Tour de France pour amateur ;
- Le très bon état d'esprit entre concurrents ;
- Le tracé, avec un bon équilibre entre montées prestigieuses, découverte de cols, et beauté des paysages.
Les moins :
- La façon dont se courre l'épreuve ;
- Quelques points d'organisation.
Le col de la Loze, une nouveauté qui devrait se faire connaitre dans les années à venir sur le Tour de France (c) Haute Route |
La course : Chaque seconde compte
Par analogie aux Transrockies, trail par étapes auquel j'ai participé en 2017, je pensais que sur une épreuve de vélo d'une semaine, les participants allaient gérer prudemment leur allure. Et bien j'avais tout faux ! Environ 1/3 des participants jouent le classement, et ne ménagent pas leurs efforts. En pratique, cela conduit à des départs très rapides, avec parfois l'obligation de se mettre dans le dur, afin de ne pas se retrouver largué. In fine, j'ai eu l'impression pour chaque étape de participer à une cyclosportive d'un jour.
Je n'étais clairement pas préparé pour ça (j'avais largement plus axé ma préparation sur l'endurance que sur l''intensité) mais comme je me suis pris au jeu du classement (putain d'esprit de compétition !), j'ai fait comme j'ai pu et je me suis retrouvé bien fatigué en fin de semaine. A refaire, je me préparerai différemment avec notamment plus de sorties courtes mais rythmées et / où la participation à plus de cyclosportives.
Par ailleurs, le déroulement des étapes avec des parties neutralisées défavorise clairement les coureurs endurants comme moi qui aiment les efforts constants. Pour bien comprendre, voici deux exemples :
- Lors de la 3ème étape, nous enchaînions col de la Madeleine, col du Glandon et Alpe d'Huez, soit c. 4.600 m de D+. La partie plate juste avant l'Alpe d'Huez était neutralisée, si bien que des coureurs s'arrêtaient longuement au ravitaillement, afin de recharger les batteries avant la montée de l'Alpe d'Huez. Un coureur a même fait une petite sieste allongé dans l'herbe !
- Lors de la 6ème étape, il y avait en début de parcours un passage chronométré de seulement quelques kilomètres, mais bien vallonné. Bien évidemment, cela a roulé "plein gaz" pendant toute cette partie pour ensuite reprendre une allure beaucoup plus cool dans la section neutralisée qui suivait.
Comme indiqué juste avant, il fallait aussi parfois se "mettre à la planche" dès la première montée pour se retrouver dans un bon groupe lors du passage en vallée qui suivait. Tactiquement, c'était le bon choix, mais d'un point de vue plaisir de rouler, c'est tout ce que je déteste, devant forcer et subir. En fait, c'est tout le contraire des efforts longues distances en course à pied (marathon ou ultra) où il est très important d'être maître de son allure et de rester au maximum à effort constant.
Pour illustrer à quel point l'esprit de compétition est bien présent chez certains, je me suis retrouvé lors de la 3ème étape dans un groupe où nous étions trois et où les deux autres se sont mis à sprinter jusqu'au tapis de chronométrage à partir du quel commençait une section neutralisée ...
Pour illustrer à quel point l'esprit de compétition est bien présent chez certains, je me suis retrouvé lors de la 3ème étape dans un groupe où nous étions trois et où les deux autres se sont mis à sprinter jusqu'au tapis de chronométrage à partir du quel commençait une section neutralisée ...
Qui participe à la Haute Route ?
De façon raccourcie, voici comment je décrierais le peloton :
- 1/3 joue le classement, les autres veulent juste finir. Les organisateurs n'hésitent d'ailleurs pas à présenter la Haute Route des Alpes comme plus compétitive que celle des Pyrénées ;
- C'est très international avec seulement c. 10% de français, et probablement les anglais les plus nombreux ;
- 85 à 90% des participants sont sympathiques, et 10 à 15% sont des "autistes". Les leaders sont très accessibles, j'ai notamment pu échanger avec Nicolas Roux sur la partie neutralisée d'un début d'étape ;
- Plutôt CSP+.
Une image forte de cette édition : le dernier arrivant de l'étape marathon de l'Alpe d'Huez accueilli par sa compagne |
Tentative d'analyse de mon résultat et de mon entrainement
- Pour une première participation, l'objectif était de finir avec un classement honorable - en toute modestie, je pense que l'objectif est atteint (75ème au général) ;
- N'ayant repris le vélo qu'en début d'année après plusieurs années d'arrêt, le délai était trop court pour revenir à mon niveau de 2014. Ce n'est finalement qu'après mon séjour de préparation en Suisse que j'ai retrouvé quelques sensations ;
- Mes lacunes en termes de puissance absolue ont été une fois de plus flagrantes. C'est très pénalisant sur le plat et les faux-plats, moins dès que la pente s'élève ;
- Mon profil de diesel a par ailleurs besoin de temps pour se mettre en route. En général, il me fallait une montée pour être bien. En consèquence, un contre-la-montre d'une heure comme ce fût le cas dans l'Izoard s'apparente pour moi à une mini-torture (image ci-dessous);
- Je me répète, mais ma préparation n'était pas bien calibrée (trop d'endurance et pas assez d'intensité). A la réflexion, j'aurais probablement du prendre un coach pour ne pas faire fausse route.
Mes quelques conseils
- Même s'il est tactiquement intéressant de parfois s'accrocher à plus fort que soi, attention toutefois à ne pas être en sur-régime dès le premier jour, car une semaine vélo, c'est long ! Certains coureurs partis trop vite n'ont cessé de chuter au classement de jour en jour ;
- Vu la taille du peloton (500 coureurs), le placement au départ de chaque étape est très important afin de ne pas se prendre une cassure. Sauf que tout le monde en est bien conscient et tente de se repositionner lors des premiers kilomètres qui sont souvent neutralisés. Ça double de tous les cotés et c'est un peu stressant. C'est probablement le moment où il faut être le plus vigilant ;
- A mon sens, l'idéal est d'avoir un accompagnant qui vous suit avec son véhicule tout au long du parcours. Cela vous permet de vous changer ou de vous ravitailler quand vous le souhaitez. De plus, après les étapes, cela facilite les déplacements pour aller à son hébergement ;
- Il n'y a pas de stand ravitaillement aux départs des étapes, il est donc conseillé d'emmener dans ses bagages de la poudre de votre boisson énergétique habituelle ;
- Il faisait parfois vraiment froid le matin, le temps que le soleil se lève (départ le plus souvent à 7h30). Un gillet et des manchettes sont donc être très utiles sachant toutefois que l'organisation en fournit mais que leur qualité est plutôt moyenne.
Tous les soirs après le briefing, c'était apéro, avec notamment une bière light ... un crime pour tous les anglais avec qui j'ai discuté (real beer ... or no beer !) |
Organisation : Bien mais peut mieux faire
Le coût d'inscription n'est pas donné (1.700 euros + 850 euros en chambre double ou 1.250 euros en chambre simple), si bien que l'on s'attend à une organisation de qualité.
Dans l'ensemble, l'organisation fonctionne bien, surtout lorsque l'on sait qu'ils déplacent quasi-quotidiennement un peloton de c. 500 coureurs. Néanmoins, tout n'est pas parfait, et voici les quelques désagréments que j'ai vécu :
- Le premier jour, j'ai pris la navette fourni par l'organisation pour me rendre de l'aéroport de Genève à Megève. Le bus nous a déposé au centre de course où nous pouvions retirer notre dossard. Après, c'était à nous de nous débrouiller pour nous rendre à notre hôtel. Sachant que le mien était à 2km du centre de course et que je devais m'y rendre avec mon vélo et une valise de plus de 15 kilos ...
- Suite à des annulations, l'organisation a pu m'upgrader en chambre single (moyennant paiement du surcoût), sauf que je me suis retrouvé dans des hôtels différents de ceux initialement attribués, et cela a mis la pagaille dans l'acheminement de mes bagages. Le 3ème jour, ma valise a été égarée et j'ai du attendre 18h pour la récupérer. Concernant la valise pour mon vélo, elle n'a pas été déposée au bon hôtel à Nice, et j'ai du prendre un taxi pour la récupérer ;
- Lors de la 6ème étape, nous sommes arrivés tôt à Pra-Loup (11h30 pour ma part) sauf que les chambres n'ont été disponibles qu'à partir de 15 / 16h ;
- Lors de la 2ème étape, nous dormions à Courchevel. Pour ma part et quelques coureurs, c'était Courchevel 1650, soit à l'écart du reste du peloton qui était à Courchevel 1850. Ce fut un mal pour un bien, car un seul restaurant (une crêperie) était ouvert le soir à 1650 quant tout était fermé à 1850 ;
- L'organisation propose de vous affréter un sac sur le parcours, ce qui permet, le cas échéant, de se changer. C'est particulièrement utile en cas de pluie, mais il est dommage que ce service soit limité en nombre. M'étant inscrit tardivement, il n'a pas été possible d'y souscrire.
Et comme d'habitude, quelques anecdotes
- Un participant italien avait littéralement embauché un domestique pour toute l'épreuve. Il s'agissait d'un ancien pro russe de chez Katusha (Sergei Pomoshnikov) qui a notamment terminé 6ème du Tour de l'Avenir en 2012. Dans les montées, il restait juste devant son client, sauf à proximité des sommets, où il prenait de l'avance pour remplir les bidons. Par contre, sur le plat, il envoyait comme une brute. Je me suis retrouvé avec lui après la descente du col de Vars, et sur le faux plat descendant qui suivait, j'ai eu sur le segment Strava le 9ème temps sur 7.000 coureurs ! La copie d'écran est ci-dessous.
- Anecdote de l'anecdote, l'ex-pro ne pouvait pas faire le tempo pour son client lors de l'épreuve du contre-la-montre dans l'Izoard. Il l'a donc fait sans retenue et termine ... 3ème. Il m'a dépassé durant ce contre-la-montre, et sur le coût j'ai été impressionné par le différentiel de vitesse, mais j'ai appris ensuite qui il était.
- J'ai sympathisé avec plusieurs Anglais, dont Ian. Coureur très puissant, mais également enrobé, il me lâchait sur les parties roulantes et par contre il m'est arrivé de le reprendre sur les pentes les plus raides. Lors d'un apéro post briefing, je lui ai fait remarquer qu'il pourrait être très fort avec quelques kilos en moins. Il m'a expliqué qu'il participait chaque année à la Haute Route et que c'était son objectif pour se motiver à perdre du poids. Il a perdu 15 kilos cette année mais était bien conscient de pouvoir en perdre encore 10. Il m'a également confié qu'il a fait de la piste plus jeune avec un records supérieur à 450 watts sur cinq minutes. Ah oui quand même ....
- La Haute Route, ce n'est pas seulement un événement dans les Alpes, mais c'est également différentes épreuves à travers le monde (Oman, Etats-Unis, Chine, Mexique, Italie ....). Un couple a fait le choix de prendre une année sabbatique pour participer à toutes ces épreuves !