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mardi 9 juillet 2024

Lavaredo Ultra Trail : Content malgré tout

un parcours magnifique 


Je me suis présenté au départ de cet ultra (120k) dans des conditions si défavorables que je doutais vraiment de mes chances de finir. Parti lentement, dans les derniers, je termine honorablement en 20h (297ème sur 1.614 partants et 1.240 finishers). 

Alors que je devrais être déçu d'avoir mis 2 heures de plus que mon objectif, je ne ressens aucune déception, et c'est même plutôt le contraire, satisfait d'avoir relevé un défi improbable.

La préparation : Pas top

Comme l’année dernière, il m’a bien fallu 3 à 4 semaines pour digérer le marathon de Paris et avoir ré-envie de m’entraîner avec de gros volumes. Sauf que contrairement à Leadville en 2023, le Lavaredo ne se déroule pas en août mais en juin, d’où une préparation trop courte pour correctement préparer l’événement. En conséquence, j'y suis allé sans grosse ambition, juste terminer dans un chrono acceptable, et surtout évoluer dans des montagnes magnifiques.

L’avant course : Stress maximum

Sachant que la course partait le vendredi à 23h, je devais initialement prendre l'avion la veille pour arriver vers 23h00-23h30 à mon hôtel de Cortina. C’était déjà un timing serré, sauf que mon avion a été annoncé avec d’abord une 1 heure de retard, puis 2 heures (ce qui aurait fait arriver vers 1h00-1h30 du matin), pour être finalement annulé.

J'ai immédiatement regardé les vols du lendemain matin pour Venise (aéroport le plus proche de Cortina) et ils s’affichaient à 1.500 euros puis 2.200 euros 10 minutes plus tard. Voyant un vol pour Milan à un prix raisonnable, je l'ai réservé sachant que cela impliquait ensuite plus de 5 heures de voiture. 

Le jour du départ de la course, je me suis donc levé à 5h15 pour prendre l'avion pour Milan. Sauf que bien entendu, l’avion a eu du retard, et ma valise est sortie après tout le monde. Sur la route, c'était très chargé, avec de nombreux ralentissements, au point de douter d’arriver avant l’heure limite de retrait des dossards (19h). Pour perdre un minimum de temps, le déjeuner se résuma à un sandwich mangé tout en conduisant. 

Arrivé à 17h45 à Cortina pour un départ à 23h, il fallait impérativement entre-temps (i) faire le check-in de la chambre, (ii) récupérer le dossard, et (iii) manger. J’ai réussi à m’allonger 1 heure et à dormir 30 minutes. La journée a été tellement stressante que j’avais l’impression d’être totalement vidé nerveusement, au point de me demander s’il était raisonnable de prendre le départ. En accord avec mon entraîneur, l’idée était au moins d’essayer, n'ayant rien à perdre, et de partir très lentement.

L'analyse de ma course

Les deux / trois premières heures furent pénibles avec une impression jamais ressentie, comme un flou dans ma tête, ce n’était pas des vertiges, mais une sensation de ne pas être bien. Finalement, la 2ème partie de la nuit s’est mieux passée, et j’ai ensuite enchaîné des périodes de bas et de mieux, comme c'est habituellement le cas en ultra. C'est à partir du 80/90ème kilomètres que je suis franchement rentré dans le dur, faisant d'ailleurs une vrai pause une fois arrivée au col Gallina, ce qui se voit dans le graphique ci-dessous sur le temps intermédiaire suivant (Rifugio Averau).



En termes de classement, ma stratégie de départ prudent s'est révélée bénéfique, avec une progression continue au classement. Une fois de plus, je réalise que l'on ne part jamais trop lentement sur ultra. A partir du Col Gallina, je pensais vraiment perdre beaucoup de places au classement, mais finalement les écarts étaient faits et j'ai limité la casse. La descente finale étant plutôt roulante, je me suis challenger à reprendre le plus de coureurs, me permettant de re-rentrer dans le top 300 (297 ème) comme le montre le graphique ci-dessous.



In fine, il est difficile d’être satisfait d’une course où je cote 553 à l'index UTMB, assez loin de mes plus hauts, et où je termine loin de l’objectif des 18 heures. Toutefois, au vu du contexte, il y a la satisfaction d’avoir su gérer / dépasser les difficultés, et en toute modestie, je suis fier de ce que j'ai fait.

Quelques enseignements

Les pieds

Tout s’est bien passé sur la première partie, mais sur la deuxième partie, une succession de petites erreurs (crème hydratante au lieu de mettre de la Nok, changement pour une semelle interne qui favoriserait les échauffements) a provoqué des ampoules, alors que musculairement j’ai été très bien jusqu’à la fin.

La nutrition

J'ai eu une sensation de dégoût pour les barres énergétiques dès les premières mastications, malgré avoir testé depuis le début de l'année un grand nombre de marques. Le seul aliment solide qui passait bien était les bananes.

Par contre, aucun problème avec tout ce qui était liquide, qu'il s'agisse de boisson (la mienne de chez Overstim ou celle de l’organisateur de chez Naak), ou de compotes Andros Sport, ou encore des nouveaux gels de chez Baouw.

La digestion

Pas de problèmes digestifs mais lorsque je comprends que je dois aller à la selle, j’ai franchement intérêt à y aller car je ressens quasi-instantanément un mieux.



Mon avis sur cette course : go for it !

Cette course est MAGNIFIQUE. Pour ma part, je la considère comme plus belle que l'UTMB. Je connaissais déjà les Tre Cime, mais d'autres parties du parcours sont tout autant magnifiques.


de bon matin aux Tre Cime


En point d'attention, je soulignerais l'importance pour un bon coureur de ne pas partir trop à l'arrière du peloton, car il y a pas mal de singles ou l'on est bloqué (et notamment dès la première descente).

Je dirais que le seul point négatif, c'est le transport, qui est long / compliqué depuis la France.




dimanche 11 février 2024

Maxicross de Bouffémont - Challenge 10k + 30k

Cette première course de l'année 2024 était avant tout l'occasion de casser la routine des sorties hivernales, mais il était bien clair que je n'avais aucun objectif de performance. De plus, pris d'un rhum (encore !) les quelques jours avant, je n'étais pas dans des dispositions idéales.

Sur la course en elle-même, c'est la première fois que j'y participais. Elle a comme avantage d'être proche de chez moi (en forêt de Montmorency, en banlieue parisienne) et de proposer différents parcours le samedi et le dimanche, si bien que je me suis inscrit au 10k du samedi et au 30k du dimanche (il y a également un 10k de nuit le samedi et un 40k le dimanche).


En leader du pack ;-)


Maxicross = Maxi boue

Ce n'est qu'une fois que l'on a participé à la Maxicross que l'on comprend mieux son nom. Cette édition 2024 était selon certains coureurs particulièrement boueuses, avec quelques portions qui ressemblaient plus à du patinage artistique, surtout pour ma part qui n'avait pas pris des chaussures assez crantées. Des Salomons Speedcross (ou équivalant) étaient probablement le bon choix, mais je n'en n'ai pas ...


Oups, j'ai coupé le parcours (et deux fois !)

Le tracé s'amuse à nous en faire prendre le plus grand nombre possible des petites côtes de la forêt, si bien qu'il y a parfois des virages à 90 degrés, voir en épingle. Cela demande une certaine attention, car on peut facilement louper une bifurcation. En toute bonne foi, j'ai involontairement coupé le parcours lors des deux courses. La 1ère fois, j'étais seul, et d'autres coureurs m'ont ensuite accusé d'avoir coupé (mais je vous jure, je n'ai pas fait exprès !) et c'est comme cela que je m'en suis aperçu. La 2ème fois j'étais avec d'autres coureurs et personne du groupe ne s'en est aperçu sur le moment (NB : la 1ère fois, je suis allé me signaler auprès du chronométreur qui m'a répondu que je n'étais pas le seul dans ce cas).


En vert, le parcours officiel du 10k
En rouge, le raccourci pris (involontairement)


En bleu, le parcours officiel du 30k
En rouge, le raccourci pris (involontairement)


Un résultat "pas trop mauvais"

Sans affûtage et sortant d'un rhum, le résultat n'est pas trop mauvais, terminant :

  • 15ème sur 516 en 46:15 sur le 10k ;
  • 22ème sur 915 en 2:39:58 sur le 30k ;
  • 3ème sur 26 sur le challenge 10k + 30k (résultats complets ici).

dimanche 7 janvier 2024

2024, le programme

2024 sera comme 2023 une année qui mixera marathon et ultra-trail, avec deux objectifs (i) améliorer mon PB sur marathon, en prenant part au marathon de Paris et (ii) continuer à me qualifier pour le tirage au sort de la Western State, en participant au trail du Lavaredo.

Mon ultra en 2023 : le Lavaredo

Mon objectif long terme est désormais de participer à la Western State, sauf que ma probabilité d'être tiré au sort est très faible les premières années (échec en 2023 et 2024) et qu'il faut chaque année se requalifier. 



Parmi les courses qualificatives pour la Western, certaines me font plus envie que d'autres et en particulier le Lavaredo, qui se déroule dans les Dolomites (en Italie), et petit coup de chance, j'ai été tiré au sort pour participer au 120 km. 

Je connais déjà les Dolomites pour m'y être entraîné en vélo en 2015 et 2016, et j'avais trouvé ces montagnes magnifiques. En plus, c'est un format 120 km plutôt roulant, ce qui devrait d'avantage me convenir. J'y vais sans objectif de chrono ou de place, juste être content de ma course.

Le Lavaredo étant positionnée fin juin, cela a grandement impacté le reste de mon planning :
  • Mes congés annuels ne seront pas consacrés à la préparation d'un ultra comme cela était le cas ces derniers étés - j'envisage à la place de randonner en Suisse ;
  • Je ne participerai pas à l'Etape du Tour. Positionnée une semaine après le Lavaredo, c'était prendre le risque d'une récupération insuffisante et de vivre une journée galère.

Marathons : Paris et New York

Je me suis ré-inscrit au marathon de Paris, avec pour objectif d'améliorer mon chrono (2:44) de 1 à 2 minutes, en supposant que tout se passe bien (préparation, conditions météos, ...).


Pour la 2ème partie de l'année, le seul objectif vraissemblablement sera le marathon de New York, 5 ans après ma dernière participation. Le parcours n'est pas propice pour améliorer son record personnel, j'essaierai simplement de faire mieux qu'en 2019 (2:49). Les inscriptions ne sont pas encore ouvertes - cela doit normalement passer sur la base de mon chrono au marathon de Paris 2023 (2:44 Vs 2:58).


Le plaisir de l'année : l'ascension du Mont Blanc

C'est un projet que j'avais dans un coin de me tête depuis quelques années, à savoir l'ascension du Mont Blanc. Il ne faudra pas hésiter à brûler plusieurs cierges pour avoir des conditions météos favorables le jour J.


Le planning complet

Maxicross - 10k + 27k 
Date : 3-4 février
Objectif : découvrir cette épreuve qui a bonne réputation / monter en puissance pour le marathon de Paris / entrecouper l'entrainement hivernal d'une course.

Trail de Glanum - 15k
Date : 25 février
Objectif : Profiter d'un déplacement professionnel dans les Alpilles pour courir

Semi-marathon de Paris
Date : 3 mars
Objectif : situer mon niveau avant le marathon de Paris

Ecotrail de Paris - Format 30k 
Date : 16 mars
Objectif : Découvrir cette course / réaliser une sortie longue avant le marathon de Paris

Marathon de Paris
Date : 7 avril
Objectif : 2:42 / 2:43 

Ascension du Mont Blanc
Date : quelque part durant la 1ère semaine de juin
Objectif : vivre une expérience / réaliser un rêve

Lavaredo - Format 120k 
Date : 28-29 juin
Objectif : être content de ma course

Semi-marathon à déterminer
Date : fin septembre
Objectif : situer mon niveau avant le marathon de New York

Marathon de New York 
Date : 3 novembre
Objectif : faire mieux qu'en 2019 / me rapprocher le plus possible des 2h45

lundi 11 septembre 2023

Leadville 100 : Dans le dur du début à la fin, mais un souvenir à vie


C'est en lisant Born to Run puis en participant à la Transrockies Run que j’ai découvert Leadville et son ultratrail. Après deux participations à l’UTMB (2021, 2022), et cherchant un nouveau challenge, j'ai spontanément pensé au 100 miles de cette ville. Le destin a fait le reste, étant tiré au sort dès ma première tentative.

Cet ultra-trail était l’objectif n°1 de mon année 2023, d’où ce long compte rendu, qui aborde, entre autres l'histoire de la course, son parcours, ou encore ma préparation.


La genèse de la course

Un peu moins de 3.000 personnes vivent aujourd’hui à Leadville, mais la localité a compté jusqu’à près de 15.000 habitants au 19ème siècle, de par l’exploitation des mines aux alentours, les sols étant particulièrement riches, avec notamment de l’or et du plomb (d’où le nom de Leadville ...).

Suite à la fermeture de la dernière mine au début des années 80 (le molybdène, un composant utilisé pour durcir l'acier) qui employait ≈ 3.000 personnes, les locaux ont créé une épreuve sportive pour maintenir un minimum d’activité économique. C’est ainsi que la première édition s’est tenue en 1983, soit un peu après la Western State (1977) et avant la Hard Rock (1992).

Rue principale de Leadville

Depuis plusieurs années, l’organisation a rajouté d’autres épreuves, aussi bien en trail qu’en VTT, et il est possible de combiner les épreuves, avec un classement dédié.

C’est la Leadville 100 qui a en outre révélé Anton Kupricka, vainqueur en 2006 et 2007. Par ailleurs, un seul français s’y est imposé, Thomas Lorblanchet en 2012 (devant d’ailleurs Anton Kupricka).


Un parcours pas si facile qu’il n’y paraît

La singularité du parcours est d’être un aller-retour, et sa première difficulté ne provient pas du dénivelé (seulement 4.200m de D+ pour 160km), mais de l’altitude, avec un point le plus bas à 2.800m (Twin Lakes) et un point le plus haut à 3.750m (Hope Pass), pour une altitude moyenne de 3.100m. A titre de comparaison, le point le plus haut de l’UTMB, le col des Pyramides Calcaires, n’est qu’à 2.600m (le grand col Ferret est lui perché à 2.550m).


Le parcours = un aller-retour entre Leadville et Winfield,
avec un double passage à 3.750m (Hope Pass)


La deuxième difficulté concerne la barrière horaire qui n’est que de 30 heures. Toujours par comparaison, elle est de 46 heures à l’UTMB.

Ces deux difficultés (altitude et barrière horaire) font que le taux de finishers est généralement aux alentours de 50%, malgré un parcours qui semble « accessible ». Pour cette année 2023, seulement 364 coureurs sur 826 ont terminé, soit un taux d’abandon de 56% !

Pour l'anecdote, le parcours va jusqu'à Winfield, là où se situaient les premières mines exploitées vers 1880.

Coup de rétroviseur sur le début de l’année

Les 4 premiers mois de 2023 se sont bien passés, avec principalement des nouveaux records sur semi-marathon (1:16 à Paris) et sur marathon (2:44 à Paris), et ce malgré le Covid attrapé 3 semaines avant le marathon (merci les plaques carbones ;-).

Par contre, il m’a bien fallu 3 semaines pour me remettre du marathon, et à partir de mai, le focus a été mis sur le trail, profitant des week-ends prolongés pour aller en montagne. Le mois de juin a été l’occasion de participer aux 70km de Montreux (15ème au scratch), puis de prendre une semaine de congés pour aller repérer les cols de l’Etape du Tour et randonner autour de Zermatt.

Magnifique Cervin 


En juillet, le volume d’entrainement a sensiblement augmenté (82h, un record), probablement trop d’ailleurs, avec un manque de fraîcheur évident pour l’Etape du Tour (614ème sur 11.791 finishers).

Début août, j’ai l’impression d’avoir franchi un cap à basse intensité, avec pour un même effort, une fréquence cardiaque plus basse, et des jambes qui fatiguent moins ... la confiance est là !


La dernière ligne droite 

Dans le contexte d’une course en altitude, l’acclimatation est primordiale, sachant qu'idéalement, il faut bien 3 semaines. Pour des contraintes professionnelles et budgétaires, cela n’était pas possible. A défaut, je suis allé à La Rosière puis à Tignes juste avant mon départ pour le Colorado, si bien qu’au total, j’aurais passé 15 nuits en altitude avant la course.

Le séjour à Tignes a d'ailleurs été l’occasion d’effectuer une sortie de 3h avec Ugo Ferrari (22ème de l'UTMB 2023), merci à lui de m’avoir accepté. Pour l’anecdote, le run s’est terminé avec Martin Gaffuri (l’un des speakers de l’UTMB) croisé par hasard autour du lac de Tignes.

@ Tignes, avec Ugo Ferrari et Martin Gaffuri


Coup de stress à 6 jours du départ, où je suis pris d’un bon coup de fatigue comme cela m’arrive de temps à autres. Des acouphènes apparaissent comme lors de mes deux Covids, mais les tests sont négatifs. En accord avec mon entraîneur, j’effectue le minimum syndical sur les derniers entraînements pour maximiser la fraîcheur. La confiance bâtie durant tout l’été n’est plus tout à fait la même au moment du départ ☹.


Un seul objectif, la big buckle

Mon objectif rêvé est de terminer en moins de 25 heures et ainsi repartir avec la « big buckle », qui est une boucle de ceinture d’une taille plus importante que celle réservée aux « simples » finishers en moins de 30h.

Ce chrono est a priori tout à fait envisageable sur la base de mon indice UTMB sur 100 miles qui est de 640 (acquis lors de l’UTMB 2022) et qui me prédit un temps en moins de 23h (25h = 590 d'index UTMB).

En outre, ayant plutôt l’impression d’avoir progressé, je me dis secrètement qu’un sub 22h est possible, à condition d'avoir bien digéré la fatigue des derniers jours. Toutefois, et pour s’éviter toute pression inutile, les temps de passage sont construits selon deux scénarios : un premier pour terminer en 22h30 et un second en 25h00.

En termes de classement, je n’ai aucun objectif, mais un chrono de 22h30 laisse espérer un top 30 sur la base des résultats des trois dernières années.


Une stratégie prudente

Sur 100 miles, la règle d’or est de partir sur un rythme très lent, et pour être certain de cela, je pars comme sur l'UTMB avec mes temps de passage sur moi. En outre, mon entraîneur me conseille de ne surtout pas forcer dans les montées, étant préférable de s’économiser à tout prix en altitude.

Même si la course est un aller-retour, la deuxième partie est sensiblement plus lente, avec d’une part, la fatigue de l’aller, et d’autre part, des montées plus raides. Une analyse des éditions antérieures montre qu’il faut boucler l’aller en 10h00 / 10h15 pour espérer terminer en 22h30.

S’agissant d’une course aux Etats-Unis, les pacers sont autorisés sur la deuxième partie du parcours, et ces derniers ont même le droit de porter le sac de leur coureur ! Et si vous ne connaissez personne, pas de problème, il est possible d’en récupérer un aux ravitaillements. Dans mon cas, j’avais envie de vivre ma course sans devoir me forcer à parler à quelqu’un que je ne connaissais pas, et j’avais donc décidé de faire sans pacer.


Une course en mode "ascenseur émotionnel"

Sur la ligne de départ, il fait encore frais mais la journée s'annonce belle et sans pluie. L'ambiance est décontractée, aucune bousculade pour être en première ligne. Des coureurs sont déjà en short et t-shirt, certains sans sac, juste une bouteille à la main, d'autres sont en chaussures de route.

A quelques minutes du départ, Ben Chlouber motive une dernière fois les coureurs. 40 ans après la création de la course, il est toujours là avec sa femme, étant précisé que tous les deux attendent ensuite tous les finishers sur la ligne d'arrivée. A 84 ans, c'est évidemment la passion qui l'anime, et moi je dis bravo. Petit coup de chance, je suis juste à coté de lui pour profiter de son discours (vidéo ici), et admirer le fusil qui donnera le départ.


Ken Chlouber prêt à donner le départ avec son fusil - J'étais juste à coté de lui !
 

Assez rapidement, je ne me sens pas à mon aise, ce qui m’ennuie profondément car cela présage une course difficile. Il n’y a pas grand-chose à y faire, juste l'accepter et espérer que cela passe ...

Malheureusement, cela ne passe pas, avec à partir du 30ème kilomètre, la sensation que mon estomac ne va pas être coopératif. Par prudence et pour ne pas me surcharger, je décide de limiter les apports liquides et solides. Ces problèmes gastriques m’inquiètent désormais sur ma capacité à terminer l’épreuve. Comme depuis le début, je n’ai rien d’autre à faire que de « gérer » cette difficulté, en ne forçant surtout pas, et en attendant que cela passe.

Arrivée à Twin Lakes (61ème km), je passe par la case WC, et j’ai l’impression de délivrer mon estomac. Dans l’ascension qui suit de Hope Pass, le point culminant du parcours, je me sens revigoré et reprends confiance en ma capacité à terminer la course. 

Dans la montée de Hope Pass (photo prise lors de la reco)

Conscient toutefois que je suis en déficit calorique, je m’efforce de manger autant que possible dans cette montée. En termes d’hydratation, je vais commettre une erreur, ne rechargeant qu’une seule de mes deux flasques lors du ravitaillement avant le sommet. Dans la descente qui suit et jusqu’au ravitaillement de Winfield (80ème km), c'est la double peine, avec d’une part, la descente qui tabasse et me re-défonce l’estomac, et d’autre part, un manque d’eau qui me conduit presque à la déshydratation.

En arrivant à Winfield (mi-parcours), je repasse par la case WC, et je sais qu’il me faut absolument boire et manger en quantité avant la deuxième montée de Hope Pass. Pour éviter tout risque de régurgitation, je décide de m’arrêter un petit moment, soit près de 25 minutes. 
Pendant ce temps, je vois les autres coureurs qui ne s’arrêtent que quelques instants, avec de nouveau un très gros doute sur ma capacité à finir la course. Il y a même un bénévole qui demande à voix haute si je vais abandonner ... 

D’un strict point de vue chronométrique, je ne suis pas trop mal par rapport à l’objectif d’être en 10h00 / 10h15 à Winfield, étant arrivé en 9h55 et reparti vers 10h20. Néanmoins, l’objectif des 25h est désormais secondaire, il ne s’agit plus que de terminer.

La deuxième ascension de Hope Pass est particulièrement pénible, la pente est plus raide (surtout sur le début), mon estomac reste « fermé », et l’altitude accroît la difficulté. Néanmoins, je m’accroche et à ma grande surprise, personne ne me reprend, doublant même deux coureurs sur la fin de la montée.

Au sommet de Hope Pass, coté Winfield (photo prise lors de la reco)

La descente s’effectue à allure raisonnable (normal avec 90km dans les jambes ...), et pourtant je double 12 coureurs. Cela m'a beaucoup étonné car je n'ai jamais été un grand descendeur.

De retour à Twin Lakes (100ème km), je constate à ma grande surprise que j’ai environ 1h d’avance pour terminer en moins de 25h. C'est à nouveau l'ascenseur émotionnel, mais je suis également conscient que le sub-25 va être au prix d'une fin de course où il va falloir en permanence s'accrocher.

Jusqu’à l'arrivée, je vais toujours rencontrer les mêmes difficultés à boire et à manger. Dès que je bois un peu d'eau, il s’ensuit d’innombrables « rototos ». Le sucré me donne la nausée, en particulier les barres (Cliff, Naak ou Baouw, même si ces dernières passent un peu mieux). Heureusement que je m’étais préparé des petits sandwichs au fromage dans mes drop bags du retour, car la seule nourriture salée disponible aux ravitaillements, ce sont des Bretzels.

L’espoir de terminer sous les 25h devient obsessionnel. Toutes les 10 à 15 minutes, je regarde le temps et la distance restants afin de calculer la vitesse minimum à tenir pour atteindre cet objectif. Je ne suis pas très rapide mais régulier, marchant dans les montées, et avançant au petit trot dans les descentes et sur le plat, si bien que je reprends de temps à autres des concurrents et remonte de 41ème à Twin Lakes (100ème km) à 25ème à May Queen (140ème km). A ce moment, il reste 20 km à effectuer en 5h30 pour obtenir la big buckle - je comprends alors que c’est normalement gagné. Oh yeah !

Cette dernière section se divise en deux parties. La première est le long du lac turquoise, c’est un single modérément technique, avec des petits « coups de culs » à passer tout du long, je ne double personne et personne ne me double. La deuxième partie est un faux plat montant d’environ 5 km. Je sais que l’objectif du sub-25h sera respecté et je n’ai plus la force mentale de courir, si bien que je me fais remonter par différents concurrents (tous accompagnés d’un pacer ...), et stresse un poil à l’idée de me faire sortir du top 30. Psychologiquement, c’est pénible, car cette partie est principalement en ligne droite, et à chaque fois je vois au loin les lumières des lampes frontales qui se rapprochent petit à petit pour me doubler. A chaque fois, je me demande si c’est un concurrent avec son pacer ou deux concurrents qui vont me dépasser d'un coup.

Je franchis la ligne en 22:38:43, en 28ème position, et me jette dans les bras des organisateurs, Ken Chlouber et de sa femme Merilee Maupin. Ce chrono était celui visé, mais compte tenu du déroulé de la course, c'est beaucoup plus fort en termes de satisfaction personnelle. 

 Mission accomplie, la big buckle est « in the pocket » 😊



Sans ordre particulier, les quelques enseignements que je retire de cette course :
  • Tout ultra-trail a ses spécificités, si bien qu'à mon sens ce n'est jamais à sa première participation que l'on va faire son meilleur temps ;
  • Courir à 3.000m est clairement un facteur supplémentaire de difficulté, il ne faut surtout pas prendre à la légère ce paramètre (la difficulté supplémentaire entre 2.000 et 3.000m est bien plus importante qu'entre 1.000 et 2.000m) ;
  • La nourriture salée sur les efforts longs est impérative pour moi ;
  • Sur l'origine de mes problèmes gastriques, je n'ai pas encore trouvé de réponse ;
  • Mon index UTMB pour cette course n'est pas encore disponible, mais sur la base des résultats antérieurs, ma cotation serait de 649, soit un peu mieux qu'à l'UTMB 2022 (640). En supposant que mes problèmes gastriques m'ont coûté 1 heure, ma cotation serait de 684 ;


Comme d’habitude, quelques anecdotes :
  • Un magasin à Leadville (Montezuma) vend des polaires qu’ils fabriquent sur place, les couturières étant d’ailleurs visibles depuis l’intérieur de la boutique. Le process pour acheter est un peu compliqué, car il faut réserver d’avance un créneau. Je ne le savais pas, mais le vendeur plutôt sympa, me dit qu'il fait une exception pour moi car je suis de l’étranger. On discute, et m'indique qu’il va courir la Leadville 100 et viser un top 10 (il avait terminé 11ème en 2021) ! Malheureusement, il était dans un jour sans, je le doublerai dans la montée de Hope Pass, et il abandonnera à Winfield ;
  • A la seule boutique de Twin Lakes, j’achète des timbres pour la France, et la caissière américaine me dit qu’elle a été fille au pair à Sèvres et qu’elle va pacer son copain pour la Leadville 100. Après le vendeur de Montezuma, je me dis que tous les locaux sont concernés d’une façon ou d’une autre par cette course !
  • Au ravitaillement de May Queen, une bénévole me demande d’où je suis en France et lui réponds de Normandie, elle me dit qu’elle a des amis qui habitent à Camembert ... soit juste à 9km de Livarot, le village où j’ai vécu jusqu’à 18 ans et où je passe encore pas mal de mes week-ends !

Pourquoi je recommande cette course
  • L’atmosphère est incroyable :
    • Les crews mettent une super ambiance aux ravitos, en particulier celui de Twin Lakes ;
    • La plupart des concurrents sont extrêmement bienveillants envers les uns et les autres (bien plus qu'en France) ;
    • Cette épreuve est portée par la charisme de Ken Chlouber, son discours sur la ligne de départ m'a électrisé ;
  • Cette course à des petites particularités qui misent bout-à-bout font son charme, je pense notamment :
    • Au début et à la fin donnés par un coup de fusil (vidéo ici) ;
    • Au passage de la rivière les pieds dans l'eau ;
    • A la boucle de ceinture remise aux finishers, c’est quand même plus stylé qu’une polaire sans manches ;-)
  • Les paysages : je ne dirais pas que le Colorado est plus beau que les Alpes, mais ces montagnes sont différentes et valent le coup d’être découvertes.

 @ Rocky Mountain National Park


Les quelques points négatifs :
  • Le coût de la participation ;
  • La contrainte de devoir s’acclimater pour ne pas trop subir l'altitude durant la course ;
  • La nécessité d’être raisonnable sur les randonnées et visites d’avant course pour ne pas trop se fatiguer, mais sinon il y a de magnifiques endroits à découvrir ;
  • Les purs montagnards seront peut-être frustrés d’une course qui manque de dénivelé, mais pour un "runner" comme moi c’était parfait !

Mes quelques conseils pour tout coureur qui souhaiterait s’aligner
  • Réserver au plus tôt votre hébergement, car les capacités d’accueil sont limitées à Leadville en particulier, et dans le Colorado en général ;
  • Concernant l’altitude, difficile de donner des conseils, l’idéal serait d’arriver 3 semaines avant, ce qui ne parait guère réaliste pour la plupart des coureurs ;
  • Je suppose que l’altitude créée une sur-fatigue, qui se manifeste surtout en deuxième partie de course, et qui explique le fort taux d’abandon. Il est donc d'autant plus important de partir prudemment ;
  • Au ravitaillement, c’est essentiellement du sucré qui est présent. Pour du salé, c’est plutôt à prévoir soi-même ;
  • En termes de chaussures, il faut privilégier un modèle mixte route et chemin pour la partie entre Leadville et Twin Lakes (Hoka ATR dans mon cas) et un modèle plus typé montagne pour la section entre Twin Lakes et Winfield (Saucony Peregrine pour moi) ;
  • Concernant les bâtons, je ne les ai pris que pour la section entre Twin Lakes et Winfield. Pour les autres parties, ils ne me semblent pas indispensables ;
  • De mon expérience, le temps change très vite dans le Colorado. Le scénario habituel, c'est un grand ciel bleu au matin, puis des nuages qui arrivent en matinée, pour terminer par un orage plus ou moins violent dans l’après-midi. Dans ce contexte, une veste de pluie tout au long de la course me semble indispensable (pour mémoire, aucun matériel obligatoire !).

dimanche 11 septembre 2022

UTMB 2022 : sub-30h !

Après une première participation en 2021 où je m'étais efforcé de finir malgré de douloureuses ampoules aux pieds, j'aspirais à prendre ma revanche, avec un résultat en 2022 au-delà de mes espérances, passant sous les 30 heures, soit 7 heures de mieux que l'année passée (!). Pour faire une comparaison, je dirais qu'il y a le moins de 3h sur marathon et le moins de 30h sur UTMB : avec un tel chrono, on n'est clairement pas une star, mais on a déjà un niveau honorable. Il m'est certainement possible de faire mieux, mais contrairement à l'année dernière, cela me suffit désormais.

Au-delà du résultat, et contrairement à 2021, j'ai eu la double satisfaction (i) d'avoir été à l'aise et de prendre du plaisir pendant les 120 / 130 premiers km, et (ii) de réussir à courir les parties roulantes, même après 100 km. Cet UTMB m'a permis de me réconcilier avec cette distance - ça valait le coup de réessayer !

La vidéo de l'arrivée : heureux !


Quelques chiffres :

  • Temps de Kilian Jornet (1er) : 19:49:30 dont 16:13 d'arrêts, soit 8,63 km/h de moyenne
  • Mon temps : 29:18:10 dont 54:12 d'arrêts, soit 5,86 km/h de moyenne
  • Mon classement général / homme / catégorie : 137ème / 122ème / 33ème
  • Index UTMB : 650


Petit retour sur la préparation

Le principal changement a été de réaliser une vraie décharge en termes de volume d'entrainement, avec au moins 3 semaines entre le dernier bloc d'entrainement et le départ. Cela me semblait indispensable car l'année dernière, je m'étais retrouvé très entamé musculairement assez tôt dans la course. Concrètement, sur les 5 semaines avant l'UTMB, mon volume d'entrainement global est passé de 99 heures en 2021 à 80 heures en 2022, soit une réduction de 20%.

Par comparaison avec 2021, j'ai également fait beaucoup plus de vélo, pas forcément pour progresser, mais surtout car j'y prends beaucoup de plaisir.

En outre, et avec la fin du Covid, j'ai pu réaliser un programme de courses plus complet et mieux adapté, participant notamment à la MaXi-Race.

Néanmoins, tout n'a pas été parfait, et j'ai dû faire face à quelques soucis :
  • Le Covid, attrapé fin décembre, et qui m'a bien épuisé jusqu'à mi-janvier ;
  • Un épisode de fatigue en avril, où je suis resté tout un week-end à dormir ;
  • Une grosse raideur aux ischios de la jambe gauche apparue en juin, après la MaXi-Race et qui a disparu dans les derniers jours avant l'UTMB. 

C'était quoi l'objectif ?

En accord avec mon entraîneur, l'objectif était de réaliser entre 30 et 32h, soit 5 à 7h de moins que l'année dernière. En toute honnêteté, faire moins de 30h me semblait possible, mais un poil ambitieux, et je ne voulais pas que cela me stresse en course.

Débriefing à l'arrivée avec le coach


Pour éviter l'erreur de 2021 avec un départ trop rapide, je m'étais imprimé tous mes temps de passage pour m'assurer de les respecter en course, étant précisé que ces temps étaient calés sur la fourchette d'objectif entre 30 et 32h. 

Le déroulé de la course

Mal placé au départ

Juste avant le départ, je dépose mon sac d’allègement pour Courmayeur et constate tous les sacs déjà présents dans le gymnase. Je comprends alors que je risque d'être très mal placé au départ, ce qui fut exactement le cas ... Les 300/400 premiers mètres furent particulièrement "chiant", avec une succession de ralentissements, puis une file compacte de coureurs jusqu'aux Contamines, sans toutefois avoir l'impression de perdre beaucoup de temps. Sachant que j'étais 712ème au col de Voza, je devais vraisemblablement être aux alentours de la 1.000ème place au départ.

A mon sens, les organisateurs devraient mettre en place un 2ème sas, en plus de celui des élites, pour les coureurs ambitieux (par exemple indice UTMB > 600). Cela fluidifierait grandement le peloton, et ce serait aux bénéfices de tous. J'ai du mal à comprendre l'intérêt pour un coureur lent de ce mettre juste derrière les élites et de se faire doubler de façon continue sur les premiers kilomètres.

A noter que les conditions météo ont été quasiment parfaites tout au long de la course. Pendant toute la semaine, la pluie était annoncée pour la nuit, mais finalement pas une goutte, et surtout ni trop chaud en journée et ni trop froid durant la nuit.

De Chamonix (départ) aux Contamines (31 km) : la tête qui n'y est pas

Sur les premières heures, les sensations physiques ne sont pas mauvaises, je suis dans les temps sans forcer, mais bizarrement la tête n'y est pas. Je n'ai pas envie de courir et je me pose même la question d'abandonner. Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi mon cerveau raisonnait de la sorte. Puis finalement, après les Contamines, tout est redevenu dans l'ordre mentalement.

Mon autre inquiétude sur ce début de course, c'est l'alimentation. Mon assistance ne pouvait pas se rendre aux Contamines, car tous les tickets de navette avaient été vendus (carton rouge à l'organisation sur ce point) et j'avais fait le choix de déposer la veille sur le parcours, caché sous des cailloux, mon ravito pour la nuit. Sauf qu'en course, j'ai été incapable de le retrouver. A-t-il été découvert ? Ai-je cherché à un mauvais endroit ? Pris de stress, je ne me suis pas attardé, si bien qu'en arrivant aux Contamines, j'ai fait main basse sur les mini-sneakers et les mini-mars pour ne pas me retrouver en hypoglycémie au milieu de la nuit. Ces bombes à sucres rapides n'étaient pas l'idéal mais cela à quand même fait l'affaire !

Des Contamines (31 km) à Courmayeur (80 km) : tout en gestion

Tout le monde le dit, la course commence à partir de Courmayeur, et aller trop vite avant, c'est la quasi-certitude de vivre des moments durs sur la 2ème partie de course. Comme mentionné précédemment, j'avais imprimé tous mes temps de passage et aux Chapieux, après 7h de course, j'étais à la minute près dans mes temps de passage, et à Courmayeur, j'avais "seulement" 16 minutes d'avance sur mon plan de marche. Surtout, j'avais l'impression de ne pas forcer et d'être beaucoup plus "frais" qu'en 2021.

De Courmayeur (80 km) à Champex (126 km) : jusqu'ici tout va bien

Cette section comporte de nombreuses parties roulantes où j'ai réussi à courir, et sans forcer je me  suis constitué un petit pécule qui ira jusqu'à près de 1h d'avance.

Au terme de cette 2ème participation, je réalise que l'UTMB est vraiment une épreuve hybride. Il faut de la puissance pour les montées et les descentes, mais il faut aussi des qualités de coureur pour avancer à bon rythme sur les parties roulantes. Me concernant, j'ai toujours manqué de puissance, que cela soit en vélo ou en course à pied, et sur cet UTMB, je me suis souvent fait doubler en montée, mais par contre, sur le plat, j'en ai aligné plus d'un ;-)

Dans les quelques péripéties de course, mon assistance est arrivée trop tard à Champex, ayant perdu du temps à trouver le départ de la navette dans Orsières (accès à Champex fermé pour les voitures). Franchement, cela n'a pas été préjudiciable pour la suite.

De Champex (126 km) à Vallorcine (153 km) : il faut maintenir l'avance

Je sais que la dernière partie à compter de tête-aux-vents m'est particulièrement défavorable, et qu'il me faut absolument conserver de l'avance sur mon tableau de marche. En conséquence, je scrute systématiquement mes temps de passage, et j'arrive presque à conserver mon heure d'avance, alors que je commence à être mis en difficulté, ce qui parait normal après 130 km de course.

Parallèlement, les problèmes gastriques débutent, avec du dégoût pour la nourriture solide et ayant l'impression que mon corps ne l'assimile plus.

Vue sur Trient (au milieu) et le col de la Forclaz (à droite)

De Vallorcine (153 km) à Chamonix (171 km) : à moi le sub-30h

A la sortie de Vallorcine, j'ai la conviction que sauf défaillance ou blessure, je devrais largement passer sous les 30h. Toutefois, cette section m'est particulièrement défavorable, trop raide, trop technique, surtout qu'avec la fatigue et la nuit, je perds de la lucidité dans ma lecture du terrain. 

Comme à chaque fois à cet endroit (CCC 2016, UTMB 2021, UTMB 2022), je me fais doubler. Au passage, je ne vois aucun plaisir dans cette section, et même plutôt du danger, avec un terrain où il est impossible de courir mais où il est par contre très très facile de se tordre une cheville. Pourquoi ne pas emprunter le même parcours qu'au marathon du Mont-Blanc, qui mène également à la Flègère ?

Pour situer mon temps de cette année sur cette section, je l'ai comparé à ceux précédents :

  • 4:04 à la CCC 2016 (gros coup de bambou dans la montée de Tête aux vents)
  • 5:50 à l'UTMB 2021 (obligé d'aller très lentement à cause d'ampoules)
  • 3:43 à l'UTMB 2022

Néanmoins, mon chrono de 2022 est lent. A titre de comparaison, un coureur qui était avec moi à Vallorcine à l'UTMB 2022 a mis 3:04 sur cette section, soit 39 minutes de moins que moi ...

Après des arrivées à deux heures du matin ou plus sur la CCC, la TDS et l'UTMB, je termine enfin pas trop tard (un peu après 11h du soir) et c'est clairement beaucoup plus sympa, avec encore de l'ambiance dans les rues de Chamonix.

Quelques éléments d'analyse

Le graphique ci-dessous montre mes écarts de temps par rapport à mon plan de marche pour terminer en 30 heures. On voit bien le départ conforme au plan, la constitution d'un matelas de sécurité en début de 2ème partie de parcours, puis le ralentissement sur la fin.


Sinon, pas de chance pour moi, je claque mon chrono l'année où la densité des coureurs sur le haut du classement est la plus forte de ces dernières éditions. Par exemple, Ugo Ferrari met 1 heure de moins qu'en 2021 (23:38 vs 24:35), et pourtant termine moins bien classé (26ème vs 18ème). Il y a eu moins d'abandons cette année chez les élites, peut-être notamment de part les conditions météos très favorables. Tout cela n'a pas fait mes affaires, car avec le même chrono et fonction des années, j'aurais pu terminer dans le top 100, comme le montre le graphique ci-dessous.

Années non reprises dans le graphique : course annulée en 2010 ; parcours raccourci en 2012 ; parcours modifié en 2017 ; parcours modifié en 2018 ; course annulée en 2020


Deux anecdotes

Hoka est là !

Hoka est devenu le sponsor titre de l'épreuve, et c'était quasi-impossible de ne pas s'en rendre compte. D'une part, leur boutique à l'entrée du village des exposants était juste énorme, et d'autre part, ils ont installé une animation lumineuse juste avant Notre-Dame-de-la-Gorge, où les coureurs devaient passer dans des cerceaux lumineux. C'était amusant.

Quasiment toute l'épreuve avec un même coureur

Du col de la Seigne jusqu'au pied de Tête-aux-Vents, j'ai fait la course avec un même coureur, sauf que nous n'avions pas exactement les mêmes qualités. Il me mettait la misère en montée et en descente, et j'arrivais à recoller sur les parties plates et en étant plus rapide aux ravitos. Il a déménagé de la Bretagne pour Chambéry et m'a indiqué que les activités comme le ski de randonnée l'avaient clairement aidé à passer en cap en trail. Je sais ce qu'il me reste à faire 😊.


What's next ?

Pour moi, et en toute modestie, il s'agit d'un aboutissement, et je n'ai pas l'intention de me tourner vers des épreuves du type Tor des Géants ou la Petite Trotte à Léon. Pourquoi pas refaire un UTMB, car je sais désormais que je peux y prendre du plaisir, mais ce ne sera pas à court terme, n'ayant pas de running stones. Cela pourrait être également un 100 miles plus roulant, comme les Américains savent le faire. J'ai une attirance pour Leadville mais mon coach m'a chauffé pour la Western State, me disant que j'étais chanceux au tirage au sort et qu'il avait un plan pour moi pour ne pas subir la chaleur. On verra ...

Sinon, dès lundi j'étais de retour au travail et il parait que j'avais la tête de quelqu'un de fatigué. Surprenant, non ?

Tout de même un peu fatigué après cet UTMB ....


vendredi 10 juin 2022

MaXi Race : les choses sérieuses commencent



Cette MaXi Race était le premier "vrai" rendez-vous en vue de l'UTMB. Même si la course de Chamonix fait le double de distance, c'est quand même 88km et 5.000m de D+, avec plus de douze heures d'effort pour ma part. De surcroit, et avec un départ à 2h50, la privation de sommeil est aussi un premier entrainement pour la nuit blanche qui m'attend sur l'UTMB.

Pour aller à l'essentiel, je termine en 12h25 à la 79ème place au général (8ème en Master 1) sur environ 1.200 partants / 1.000 finishers :

  • Concernant le temps, mon coach prédisait entre 12 et 13h, et je suis pile-poil au milieu ; 
  • Concernant le classement, ce n'est pas terrible, mais je suppose une certaine densité sur cette course.

Sur la course en elle-même, franchement, je la recommande. Les vues sur le lac, surtout en 2ème partie de parcours, sont magnifiques, et ce d'autant plus quand la météo est de la partie comme cela était le cas. Le tracé est varié avec du roulant, du technique, et du plus ou moins raid. Ce trail a été critiqué par le passé pour ses bouchons, mais pour ma part je n'ai eu aucun problème. Par ailleurs, c'est très bien balisé, et des bénévoles sont présents à de nombreux carrefours.


2h20 du matin : prêt à partir !


Quelques éléments d'analyse

Le fait marquant de ma course aura été d'être plus à l'aise dans les descentes que dans les montées, ce qui est tout le contraire de mes qualités habituelles. Cela m'a vraiment étonné. 

Pour les montées, il y a à la fois un manque d'entrainement avec les bâtons dans des pentes raides, et à la fois un mauvais pacing, en ayant probablement trop forcé dans la montée de Montmin.

Pour les descentes, j'ai encore du mal à y croire. Celle vers Villards-Dessus est vraiment "méchante", et aucun coureur ne m'a doublé, au contraire j'en ai doublé plusieurs. En début de descente, un relayeur m'a doublé mais a calé 10 minutes plus tard, le redépassant (ahahah !). Après cette descente, un segment de plat suivait, et j'ai pu courir normalement et recoller à deux autres coureurs. Ce scénario s'est reproduit dans la dernière descente où personne ne me double et où je reprends un concurrent à 2 km de l'arrivée (yes !).

Les explications plausibles sont :

  • Une reco. de la MaXi Race judicieusement placée 3 semaines avant la course pour laisser suffisamment de temps à l'organisme de reconstruire des fibres ;
  • Deux jours avant la reco, j'avais fait une séance d'escalier à Montmartre qui m'avait bien entamé musculairement. J'ai remis une séance de rappel 10 jours avant la MaXi Race ;
  • Je fais désormais l'exercice de la chaise "sur les talons", cela a supprimé mes précédentes douleurs dans les muscles tibiales, et j'émets l'hypothèse que cela m'a également renforcé pour les descentes.


En fin de parcours, dans le Mont Veyrier

Concernant les autres points qui m'ont marqué :

  • Sur l'alimentation, j'ai testé les boulettes de riz et c'est passé tout seul. Par contre, grosse erreur, j'ai oublié d'emporter du salé, et après plusieurs heures, mon estomac était écœuré du sucré.
  • Comme souvent, j'ai eu un creux d'énergie vers le 60ème km. Il faut faire le dos rond, et ça revient plus ou moins.
  • Je n'ai pas super bien géré mon effort, étant obligé de faire un vrai arrêt au 2ème ravito pour me refaire car j'avais trop puisé dans la montée.
  • Concernant le départ à 2h50, j'avais peur de ne pas réussir à m'endormir, mais je n'étais pas au mieux de ma forme la veille, faisant 2 siestes dans le TGV, et réussissant même à m'endormir à 21h (cela devait faire plusieurs années que cela ne m'était pas arrivé ...). A priori, j'avais récupéré pour la course, juste un petit mal de tête sur le 2ème tiers de la course.

Tentative de rationalisation de la performance

La façon la plus simple de quantifier une performance en trail est de regarder l'index UTMB, et là c'est plutôt la déception. Avec 647 points sur la MaXi-Race, c'est moins bien que :

  • Les 674 points du Swiss Canyon Trail en 2021, couru en préparation de l'UTMB ;
  • Les 681 points du trail du Gypaete en 2018, couru en préparation de la TDS .
Du coup, aucune raison de s'enflammer en vue de l'UTMB ...

Bien content d'arriver !


Deux petits conseils pour cette course

  • J'avais repéré le parcours 3 semaines avant la course (sur deux jours), et cela m'a semblé très utile, notamment car le parcours comporte de nombreux replats plus ou moins longs et cela permet de bien gérer tous les moments où il faut se remettre à courir (ou pas).
  • Attention, il n'y a que deux ravitos avec du solide sur cette course.

Annecy, une ville qui donne envie d'y vivre !

dimanche 3 avril 2022

Diagonal des Yvelines (50 km) : Médaille en chocolat !

J'étais venu sur cette course pour faire une sortie longue, et après deux heures à un rythme tranquille, je me suis pris au jeu, remontant quelques concurrents, pour terminer 4ème ... mais premier Master 1, yes !

Les 5 premiers du classement, dont moi 😉


On est bien d'accord, c'était une course à saucisson, mais ça fait quand même plaisir pour l’ego. 

Coté parcours, rien d'extraordinaire. Le début est monotone avec de longues lignes droites sur de larges chemins, et quasiment tout plat. La fin est plus amusante avec des singles, des petits coups de cul à passer, et de jolies vues.

Coté organisation, le parcours était très bien balisé. Le seul reproche concerne l'accès au lieu de course, qui est longuet en transport en commun, comme ce fût pour mon cas.

Quelques statistiques :

  • Chrono du 1er : 3:43:19 ;
  • Chrono du 3ème : 4:03:53 ;
  • Mon chrono : 4:12:34.

Classement complet ici

Evolution de mon classement :

  • 13ème au 1er intermédiaire ;
  • 6ème au 2ème intermédiaire ;
  • 4ème à l'arrivée (sur 133 finishers).


Mon lot de 1er vétéran : une bouteille de jus de pomme et un filet garnis 😊


samedi 12 février 2022

Trail Glazig


Le trail Glazig se déroule en Bretagne, avec des courses le samedi et le dimanche, et des classements cumulés possibles. Pour ma part, j'aurais aimé faire le défi du Goëlo avec 20k le samedi soir et 26k le dimanche matin, mais c'était déjà complet plusieurs mois à l'avance. Par défaut, je me suis rabattu sur le 20k le samedi et le 12k le dimanche, sachant qu'il n'y avait pas de classement cumulé pour ces deux épreuves.

Après avoir attrapé le Covid fin décembre, j'ai du m'arrêter pendant 3 semaines, la faute à une grosse fatigue, si bien que je me présentais sur la ligne de départ avec seulement 2,5 semaines d'entrainement, j'envisageais de courir en mode entrainement, mais in fine, mon orgueil de coureur a repris le dessus ;-)

Mon classement à chacune des courses n'a rien d'extraordinaire, mais à la vue du peu de volume d'entrainement, ça me parait tout à fait convenable et surtout j'ai désormais la quasi-certitude que la fatigue du Covid est bien derrière moi - ouf !

Concernant les courses, je les ai trouvées bien organisées, et avec différentes distances le samedi et le dimanche, chacun peut construire son week-end à la carte.

Concernant les parcours, il y a des passages sympa avec notamment le port de Bicnic, la plage, le chemin des douaniers, et le tunnel où passe un ruisseau.

Samedi soir : 20 km

Je suis parti prudemment, voulant à la base faire une sortie longue, mais bloqué dans le paquet, avec des arrêts forcés sur un single, j'ai décidé d'accélérer au bout du 5ème kilomètre. Cette accélération aurait du être ponctuelle, juste pour me replacer, mais j'ai oublié de remettre le frein à main, et en toute modestie j'ai effectué une belle remontée. Au 10ème kilomètre, j'étais 79ème, et à l'arrivée 43ème, soit 36 coureurs repris sur la 2ème partie de courte, pas mal ! Je me suis amusé à déterminer le classement sur ce 2ème 10k, et je me classe 15ème.

Temps : 1:39:40 (vainqueur en 1:30:12)

Classement : 43ème sur 615 (10ème en M1)

Dimanche matin : 12 km 

Comme la veille, je suis parti prudemment, sauf que là ce n'était pas volontaire, c'est juste que mes jambes ne pouvaient pas aller plus vite ! Après 4 kilomètres à allure modérée, les sensations étaient meilleures, et j'ai pu reprendre bon nombre de coureurs, pour terminer presque au même classement que la veille (42ème versus 43ème).

Temps : 59:38 (vainqueur en 42:05)

Classement : 42ème sur 511 (5ème M1)


Oups, dossard à l'envers

dimanche 7 novembre 2021

UTMB 2021 : Arrivé, mais pas satisfait

Tout ça pour une veste sans manche ...

Avant d'en prendre le départ, je voyais l'UTMB comme un aboutissement, un accomplissement majeur dans mon parcours de coureur à pied. Après coup, j'ai la satisfaction d'avoir terminé, mais le chrono n'a pas été à la hauteur de mes espérances, et surtout je n'ai pas envie (pour le moment) de recommencer.  

Ce post revient sur cette aventure en quatre parties :

  1. Un compte-rendu ;
  2. Une analyse chiffrée ; 
  3. Un retour d'expérience sur mes erreurs ;
  4. Quelques réflexions personnelles sur l'ultra-trail.


1. Le compte rendu

Je termine cet UTMB en 36h40, soit au-delà de mon objectif entre 30 et 32h. En termes de classement, je termine néanmoins dans le premier tiers, à la 348ème place sur 1.520 arrivants (environ 800 abandons, soit plus d'un tiers des partants !).

Pour faire simple, ma course s'est déroulée en 3 actes :

Acte I : de Chamonix à Courmayeur (km 81), tout va (presque) bien

Sur la ligne de départ, je suis clairement rempli par l'émotion, avec la concrétisation d'un projet entrepris depuis plusieurs années. En toute franchise, la musique de Vangelis était à deux doigts de me mettre les larmes aux yeux.

Sur ce début de course, c'est vraiment l'ambiance qui m'a marqué. Que ce soit à Chamonix, à Saint-Gervais ou à Notre-Dame de la Gorge, l'ambiance était fantastique.

Mon erreur sur ce début de parcours a été de partir trop vite. J’avais déterminé des horaires théoriques de passage pour mon assistance sur les bases de 30-32h et je me suis retrouvé à avoir jusqu'à 1h d’avance. J'avais l'impression d'être à l'aise sur ce début de parcours, mais non, j'aurai dû me mettre encore un cran en dessous.

Les pyramides calcaires lors de la reco :
magnifique mais technique

Le passage marquant de ce début de course est celui de la descente des pyramides calcaires, effectuée dans un pierrier. J'avais reconnu ce segment début aout, et conscient de sa difficulté technique, je me suis appliqué à descendre avec la plus grande attention, afin d'éviter toute entorse. De ce point de vue, cela s'est bien passé, mais par contre, j'ai bien senti que les pieds chauffaient, et c'est là probablement le déclencheur de mes problèmes pour la suite.

La descente d'après vers Courmayeur et surtout sa 2ème partie avec ses nombreuses marches (après le col Checrouit), m'a fait comprendre que je commençais à être sérieusement entamé musculairement, ressentant de grosses raideurs dans les quadriceps.

Je suis arrivé à Courmayeur avec un trop bon classement pour mon niveau (111ème), et des premiers signes de fatigue.

Acte II : de Courmayeur (km 81) à La Fouly (km 113), le début des ennuis

Dans le gymnase de Courmayeur, l'affluence des spectateurs était réduite, normal il était 5h du mat ! Les temps d'arrêts étaient sensiblement différents d'un concurrent à l'autre. Pour ma part, entre se reposer un peu, se restaurer, se changer, se noker les pieds et faire la grosse commission, je suis resté 26 minutes. Cela m'a semblé beaucoup, et pourtant je gagne 3 places entre l'entrée et la sortie (de 111ème à 108ème). A titre de comparaison, François d'Haene s'est arrêté 5 minutes (!). 

Dans la montée qui suit vers le refuge Bertone, je ressens une première grosse fatigue et plusieurs personnes me doublent. Mais c'est surtout après la montée, jusqu'à Arnouvaz que les ennuis vont vraiment commencer.

J'ai mal aux jambes, j'ai mal aux pieds, et il fait vraiment très froid. Pour la nuit, je m'étais bien couvert et une fois arrivée à Courmayeur, je me suis dévêtu, me disant qu'avec le lever du jour et le beau temps annoncé, les températures allaient monter. Le beau temps était effectivement au rendez-vous avec un beau ciel bleu, mais nous étions sur le versant à l'ombre, et surtout un fort vent glacial soufflait.

Cette section comporte de nombreux faux plats ou des descentes qui sont largement "courable". Mais je n'étais pas bien, et la sanction fut directe, me faisant passer par des wagons de coureurs, et rétrogradant de la 108ème place à Courmayeur (km 81) à la 151ème place à Arnouvaz (km 99).


Y avait du soleil mais, ça caillait après Courmayeur

J'ai eu l'impression de m'arrêter longuement à Arnouvaz mais au final il en était de même pour tous, et dans la montée au Grand Col Ferret (km 103), je suis arrivé à aller presque aussi vite que les autres (seulement 4 places de perdues, 155ème).

Dans les 10km de descente jusqu'à la Fouly (km 113), je me suis forcé à courir afin d'arrêter de me faire doubler, et bonne surprise, ce fut 3 places de gagnées (152ème).  


Acte III : de la Fouly (km 113) à Chamonix (km 172), en mode survivor

Arrivée à la Fouly, je craque et pleure quelques instants. Les douleurs aux pieds sont trop difficiles à supporter, je ne me vois pas continuer à courir et forcément cela pèse sur mon mental.

A la sortie du ravito, je réalise que j'ai oublié de me noker les pieds. Je m'arrête, retire mes chaussettes et découvre l'origine de mes douleurs : des ampoules remplies de sang, c'est la première fois pour moi. Je repars en me disant que je me ferais soigner à Champex, mais c'était une erreur, j'aurais du le faire dès La Fouly.  

A partir de ce moment et jusqu'à la fin de la course, je ne vais quasiment plus courir, seulement marcher. Conscient que je vais être très lent, je rationalise l'effort à produire pour être finisher. Il me reste un peu plus de 50 km à parcourir et j'ai 24h pour le faire. Ca fait donc du 2km/h, aucune raison de s'inquiéter, je ne ferai pas le chrono espéré mais c’est parfaitement envisageable de terminer dans les délais.

Plusieurs personnes m'ont posé la question de savoir si j'avais pensé à l'abandon à ce moment-là, et bien, très honnêtement non. J'étais tellement programmé mentalement pour terminer l'UTMB, tellement obsédé par cette course, qu'il aurait fallu une blessure totalement invalidante pour me faire arrêter.

Arrivée à Champex-Lac (km 127), j'en profite pour enfin me faire soigner les pieds, et j'adresse d'ailleurs un très grand merci à l'équipe des podologues pour leur prise en charge, ils étaient aux petits soins. En pratique, ils ont retiré le sang, retiré de la corne, mis un pansement et noké le tout. Malheureusement, j'ai du me ré-arrêter par la suite à Vallorcine, les poches de sang s'étant reformées.

Sur cette fin de parcours, j'arrive à être aussi rapide que le reste du peloton en montée. Par contre, je me prends des "avoinées" sur le plat, les parties techniques et les descentes. C'est souvent des petits wagons de 3, 4 ou 5 coureurs qui me doublent. Ca m'énerve, mais comme mon seul but est de terminer, j'arrive à dédramatiser la situation. En termes de classement, c'est évidemment la dégringolade : 197ème à Champex (km 127) puis 289ème à Vallorcine (km 154).

Je n'avais pas l'intention de dormir et c'est finalement sur la fin de parcours que le problème va se poser. Je suis pris de somnolence à la sortie de Vallorcine et c'est dans la montée de la tête aux vents que je m'arrête 3 fois environ 1 minute pour faire des micro-siestes sur le coté du chemin.

La partie technique jusqu'à la Flégère ainsi que la descente finale vers Chamonix sont interminables (racines et cailloux étaient insupportables). Arrivé dans Chamonix, je prends mon temps pour terminer, laissant un coureur me doubler pour être certain d'être seul sur la photo d'arrivée  ;-)


Arrivée à Chamonix à 5h40 du mat ...


Evidemment quelques anecdotes

  • Peu de temps avant d'arriver au refuge de la Croix du Bonhomme, j'entends des spectateurs qui s'égosillent à crier des "Allez Xavier", et idem quelques centaines de mètres plus loin. En les écoutant, je crois comprendre qu'il s'agit de Xavier Thévenard, et oui effectivement, il est à la dérive, et je le double dans le début de la descente menant aux Chapieux (il abandonnera juste après) ;
  • Je devais être le chat noir de la famille Thévenard sur cet UTMB, car juste avant d'entrer dans le gymnase de Courmayeur, je double cette fois le frère de Xavier Thévenard, Jean-Marie, qui lui abandonnera à ce point là de la course ;
  • Je ne sais pas si on peut vraiment dire que j'ai été victime d'hallucination mais mon cerveau avait sur la fin de parcours de grosses difficultés à interpréter les formes qu'il distinguait. Des rochers étaient identifiés comme des humains, des végétations comme des animaux, cela durait quelques secondes, puis je m'en rendais compte.


La fameuse bière d'après course .... à 6h du mat !


3. L'analyse chiffrée

Pour avoir une vision fine de ma course, je me suis "amusé" à établir le classement segment par segment, tel qu'illustré par le graphique ci-dessous. Juste une remarque importante, ce classement intègre uniquement les coureurs ayant terminé l'épreuve. Ceci explique pourquoi je suis classé à Saint-Gervais 79 versus 134 au classement officiel (en d'autres termes, sur les 133 coureurs devant moi à ce moment de la course, 55 n'ont pas terminé !) :


Ce graphique confirme bien mon départ trop rapide et les premières difficultés à la sortie de Courmayeur. Par ailleurs, j'avais conscience d'avoir été lent sur la fin de parcours mais là je découvre que je suis dans les derniers, il était vraiment tant que cela se termine ! 


4. Mon retour d'expérience

Cette course ne s'est pas déroulée comme prévu, et fort de cet échec, voici à mon avis tout ce qui n'a pas marché pour moi durant cette préparation, et de façon plus générale tout ce qu'il est important de savoir.

(i) L'inconnu d'une première fois 

J'ai loupé mon premier marathon, j'ai loupé mon premier 100km en montagne et jamais deux sans trois, j'ai loupé mon premier 100 miles en montagne.

A mon sens, un 100 miles est vraiment différent d'un 100 km, et il est clair que l'expérience sur ce format est indispensable pour performer. Si je devais refaire un 100 miles, il y a plein de choses que je ferais différemment, mais il faut le vivre pour le comprendre.

(ii) Un parcours difficile, quoi qu'en disent certains

L'UTMB a la réputation d'être "roulant" et c'est plutôt vrai, même si deux (courtes) sections sont techniques, à savoir (i) la descente des pyramides calcaires qui s'effectue dans un pierrier et (ii) le passage entre tête aux vents et la Flégère, avec de la caillasse de partout.

Néanmoins, les descentes présentent des dénivelés importants, à même de vous "défoncer" musculairement. Sur ce point, et alors que j'avais beaucoup travaillé à l'entrainement, j'ai pourtant été rapidement mis en difficulté (dès la mi-parcours).

Les zig-zags correspondent à la montée bien raide de la Tête aux vents 
(photo lors de la reconnaissance du parcours en aout)


(iii) La fatigue de la nuit

C'est pour moi l'énorme différence entre un UTMB et une CCC, car on attaque directement par une nuit blanche, et au petit matin, il reste encore 90km à faire. Sur ce point, la résistance à la fatigue me semble être un facteur de réussite au moins aussi important que les qualités de coureur.

(iv) Une préparation perfectible

A la réflexion, ma préparation comportait les points faibles suivants :

  • Une année précédente (2020), où entre mon changement de job, mon déménagement et le Covid, j'ai peu pratiqué, partant de très bas à la reprise ;
  • Un premier semestre 2021 perturbé par le Covid, où je n'ai pas pu faire le programme de courses souhaité, en particulier un trail en montagne de 80 km en juin, avec au moins 5.000m de D+ ;
  • Un contexte professionnel chargé ;
  • Un gros bloc d'entrainement placé trop proche de l'UTMB, et qui m'a probablement coûté en fraicheur. Malheureusement, compte-tenu de mes contraintes professionnelles, il m'était difficile de faire autrement, et j'avais une forte envie de profiter de la montagne pour mes vacances.

Pour finir, et au risque de me répéter avec des posts précédents, je pense que la meilleure façon de préparer ce type d'épreuve est de vivre à la montagne, afin d'être le plus adapté aux spécificités de ce terrain. D'ailleurs, vivre à la montagne serait le seul élément qui pourrait m'inciter à me ré-inscrire à ce type de course. 

(v) Un pacing défaillant

On dit qu’il ne faut pas partir trop vite sur un ultra, mais je dirais plutôt qu’il faut partir lentement, très lentement. Sur cet UTMB, j'ai vraiment eu l'impression de partir "facile" (j'ai marché dès les premières côtes entre Chamonix et Les Houches) mais lorsque je compare à mon plan de course, j'ai pourtant eu jusqu'à 1h d'avance. 

Ma recommandation est qu'il faut partir avec ses temps de passage sur soi et les vérifier toutes les 30 minutes pour le cas échéant se freiner.

(v) Des pieds mal préparés

Sur ultra, tout est important, n'importe quel petit détail peut lourdement perturber votre course. Sur cet UTMB, ma mauvaise préparation des pieds m'a clairement mis en difficulté, alors qu'il aurait été possible de facilement l'éviter. 

Habituellement, j'enlève la corne avec une râpe que j'ai perdue deux semaines avant le départ et je n'ai pas pu racheter la même. La nouvelle n'était pas aussi efficace pour enlever les excès de corne et malheureusement, je ne m'en suis pas inquiété.

Les podologues qui m'ont soigné sur cet UTMB m'ont clairement recommandé d'aller voir un professionnel avant la course pour préparer ses pieds. Ils déconseillent les râpes, à même de provoquer des échauffements, et préfèrent utiliser des lames pour enlever la corne.

J-1 : Préparation du matos


4. Quelques réflexions personnelles sur l'ultra-trail 

Libéré d'avoir terminé l'UTMB, cela a été pour moi l'occasion de prendre du recul sur cette course et plus généralement sur ma pratique.

J'ai vraiment aimé la partie de la préparation faite en montagne avec des sorties de 30 à 40km. On a le temps de profiter des magnifiques paysages, et on est suffisamment remis d'un jour sur l'autre pour enchainer les sorties.

A l'inverse, j'ai pris peu de plaisir sur l'UTMB et je ne suis pas certain d'avoir les prédispositions pour un jour en prendre. Je pense notamment qu'il faut avoir des super qualités musculaires de résistance pour enchainer les descentes et être capables de courir un maximum de section. Je pense qu'il faut également une grande résistance à la fatigue, notamment pour avoir encore de l'énergie après la nuit blanche.

Je me posais déjà la question pour la CCC et la TDS, mais là c'est encore pire, est-ce que l'UTMB c'est encore de la course à pied ? 

Cela m'a tellement interpellé que j'en ai parlé à mon entraineur qui m'a dit : "Pour moi, ce type de course est certainement trop extrême et trop éloigné ou hors normes par rapport à une appellation trail. De plus la gestion du sommeil, de la fatigue se rapproche plus de celle des marins (courses au large) et donc hors standard même du trail". Ces paroles m'ont rassuré - je ne suis pas le seul à penser cela.

Par ailleurs, au vu de mon expérience et de mon potentiel actuel, je pense qu'un 100 / 120 km est pour moi le maximum pour prendre du plaisir sur un trail de montagne, et que mon épreuve préférée, c'est le marathon. C'est le bon mix entre vitesse et durée (ça dure un peu et la vitesse n’est pas dégueulasse). 

Enfin, je m'interroge également sur le succès de l'UTMB. Environ 1/3 des personnes ont abandonné en 2021 et 50% ont mis plus de 41 heures, et pourtant il est compliqué de s'y inscrire. Qu'est ce qui motive le coureur moyen du peloton ? J'ai du mal à croire qu'il s'agisse du plaisir pris en course. Est-ce la satisfaction d'avoir terminé ? Mais n'est-ce pas disproportionné par rapport à ce qu'il faut endurer ? Est-ce la production d'endorphine qui rend le corps totalement accro ?


Epilogue : et au fait, c'est quoi la suite ?

Après un marathon, j'ai toujours une période de fatigue de 1 à 2 semaines, qui se traduit généralement par un week-end de glandouille totale.

Pour cet UTMB, cela a duré 6 semaines (!), et en plus, je suis tombé malade :-(. C'était vraiment impressionnant, je n'avais plus aucune énergie pour faire du sport le week-end alors que normalement c'est mon passe-temps favori. D'ailleurs, mon entraineur m'avait prévenu en m'indiquant que cela pouvait durer jusqu'à 2 mois.

Dans ce contexte, il n'y aura probablement pas d'autre compétition sur 2021, rendez-vous donc en 2022 !